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Nos réflexions - Un ‘’tiers-lieu’’ associé à un habitat pour seniors

08/02/2024
Nos Réflexions

La maison @Home que CABASA est en train de mettre en place, c’est d’abord une maison pour seniors où tout est mis en œuvre pour que chaque habitant se sente chez soi grâce à un accompagnement adapté à ses besoins, rythmes et envies. C’est aussi la volonté d’associer à cette maison, un tiers-lieu ouvert sur le quartier. Pourquoi cette combinaison ? Quels avantages, notre collectif espère apporter à son modèle d’habitat ? Quels points de vigilance seront à observer ?

Un tiers-lieu, c’est quoi au juste ?

Historiquement, la notion de tiers-lieu est née de la volonté de créer un troisième endroit, intermédiaire entre le domicile et le lieu de travail. Il consiste en une mise à disposition d’un lieu à des personnes qui sont à la recherche d’un espace pour exercer une activité propre. Il existe autant de définitions que de tiers lieux. Cela étant dit, la dynamique tiers-lieu repose sur plusieurs ingrédients : accessibilité et convivialité au service de la rencontre, des échanges et de la mixité sociale. Les tiers lieux permettent donc de (re)tisser du lien social et constituent ainsi de nouveaux lieux de vie, que les “usagers” sont invités à s’approprier.

Dans tiers-lieu, on peut distinguer deux termes. Premièrement, le tiers qui, symboliquement, permet l’écart dans une relation duelle, le regard critique, le pas de côté, qui évite la symbiose susceptible de mettre à mal l’expression libre de la différence de chacun des protagonistes. En ce sens, un tiers-lieu est aussi ce qui permet de se mettre en marge des contraintes sociales, culturelles ou autres. Il permet un autre regard sur nous-mêmes ou nos pratiques. Deuxièmement, il y a la notion de lieu : celui-ci est est un prétexte à rassembler des gens qui à priori n’ont pas pour vocation de se rencontrer. Il en émerge une création, une innovation, une découverte et une confrontation à l’inattendu. En effet, le résultat de la rencontre est supérieur à la somme des parties en présence.

Un tiers-lieu est-il compatible avec un habitat ?

Une habitation ne peut être en même temps un tiers-lieu, car une habitation doit privilégier l’intimité et le chez-soi (cfr GT réflexion précédent ayant pour thème « le chez-soi »). Mais elle peut intégrer en son sein un espace qui sert de tiers-lieu. Pour un résident, le tiers-lieu peut donc être l’opportunité d’élargir son champ social vers les visiteurs et les autres résidents, de découvrir de nouvelles activités, et de mettre en valeur ses propres compétences et particularités qu’il voudrait mettre à disposition d’autrui.

Le tiers-lieu idéal selon CABASA : points d’attention

Échange services contre compétences

Il importe en effet que les habitants qui bénéficieraient de services extérieurs puissent en échange partager leurs compétences propres, par exemple liées à leur expérience de vie. La relation soignants-soignés s’estompe dès lors au profit d’un échange de services. Les compétences et particularités propres des proches et des familles s’inscriraient également dans la dynamique du lieu. Chaque visiteur a donc dès lors un rôle actif dans le tiers-lieu. Il ne s’agirait plus seulement de venir voir un parent mais de participer à la vie du lieu.

Diversité

La diversité du tiers-lieu doit être favorisée. Si la tendance d’un habitat communautaire va naturellement vers le cloisonnement et la fermeture sur l’extérieur, le tiers-lieu insiste sur l’ouverture vers l’extérieur et l’altérité. L’accès aux personnes extérieures doit y être facilité. Il devrait plus encore donner envie aux personnes extérieures d’y rentrer. Par exemple, en proposant des repas accessibles et qui donnent envie aux personnes du quartier. De la même façon, un soignant doit pouvoir s’y retrouver dans les soins qu’il prodigue à un habitant, ne fusse-ce qu’en considérant que le lieu en lui-même est source d’enrichissement personnel. Par conséquent, il conviendrait peut-être en conséquence de modifier le terme de soignant par celui d’accompagnateur.

Horizontalité 

Le tiers-lieu se veut par ailleurs non hiérarchique : il favorise l’échange sur un pied d’égalité. Les uniformes qui instaurent une relation de non-équivalence sont à proscrire. Le tiers-lieu ne tend pas pour autant à supprimer les différences et les singularités ; il vise même à les valoriser pour en faire profiter autrui.

Appartenance et participation

Le tiers-lieu ne cherche pas non plus à empêcher un sentiment bienfaisant d’appartenance à une communauté. Les habitants du lieu ont besoin sans doute de construire dans la durée un sentiment d’identité et d’appartenance, et de se retrouver parmi du connu. La sélection des candidats habitants peut par exemple se faire dans l’échange et le partage entre habitants, ce qui favorise la cohésion du groupe. De même, il s’agit de trouver une façon commune d’accueillir les nouveaux habitants, d’une façon où tout le monde s’y retrouve.

Accueil facilitant

Un concierge, ou un facilitateur, pourrait jouer le rôle de favoriser l’échange, donner une certaine dynamique à ce tiers-lieu, tout en maintenant des gardes-fous et un cadre sécurisant pour les habitants et les personnes extérieures qui s’y rendent. Il s’agit de veiller à une hospitalité, un accueil, et également d’avoir une démarche active vers l’extérieur, comme par exemple des contacts avec le réseau d’aides extérieures. Ce facilitateur aurait pour fonction de promouvoir les désirs des personnes, mais aussi de leur donner corps si possible, dans une relation de dons et contre-dons.

Une idée à tester

Pour le collectif CABASA, associer un habitat pour seniors (avec ou sans troubles cognitifs) à un tiers-lieu, c’est inscrire la volonté de décloisonner les lieux de vie pour seniors. Notre objectif ? Visibiliser et inclure les seniors dans une société qui rêve de jeunesse éternelle. Restituer leur pleine citoyenneté aux plus âgés en leur permettant de retisser des liens avec les autres générations. Créer un lieu où les habitants de l'habitat, les voisins du quartier et les acteurs de la vie sociale locale ont la possibilité de co-construire des espaces de rencontre hybrides :  cafés solidaires, jardins partagés, « places de village », bibliothèques, salles de musique, etc. : la forme change au gré des ressources et des besoins des acteurs locaux.. Mais partout se retrouve la même volonté de mélanger les générations et les publics. L’équipe de CABASA compte bientôt tester l’idée… 

Pour aller plus loin : Gibia B. (2022, 9 octobre) Tiers-lieux, quels modèle pour demain ? solidarum.org - https://www.solidarum.org/vivre-ensemble/tiers-lieux-5-quels-modeles-pour-demain
 

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